Levée de fonds et investissement à impact : comment se préparer ?

Compte-rendu de la conférence Fonds d’investissement à impact : Comment se préparer à ce type de levée de fonds ?

16 avril 2019 – 18h-19h30

Ce mardi 16 avril, Les Canaux testaient un  nouveau format événementiel à destination des entrepreneurs à impact : 1h30 pour échanger avec une structure d’accompagnement et une entreprise sociale autour d’un sujet concret. Un retour d’expérience précieux pour les porteurs et porteuses de projet présents !

Pour cette première édition, c’est le fonds d’investissement solidaire Phitrust et la structure d’insertion écologique Ecodair qui se sont prêtés au jeu. Le sujet abordé : Comment réussir sa levée de fonds à impact ?

La conférence était animée par Davina MacPhail, responsable de l’investissement de Phitrust, et Etienne Hirschauer, directeur général d’Ecodair.

Phitrust

Phitrust a été créée en 2006 par Olivier de Guerre qui, animé par une fibre philanthropique, a eu l’idée de réunir l’investissement au capital d’entreprises avec le monde de l’ESS. Phitrust Partenaires est une société d’investissement à dimension sociale qui apporte un soutien technique et financier à de petites et moyennes sociétés à but lucratif qui créent un impact social et environnemental positif. Phitrust Partenaires investit à l’échelle mondiale dans un éventail de secteurs, en privilégiant le financement d’entreprises à dimension sociale en Europe et en Afrique occidentale.

Fonds d’entrepreneuriat social européen (EuSEF), Phitrust Partenaires dispose aussi de l’agrément « Entreprise Solidaire » et du label Finansol.

Ecodair

Ecodair est une association qui existe depuis 15 ans et qui comprend 120 personnes. Elle dispose de trois sites – deux en région parisienne et un à Marseille – et son objet est triple :

• Une mission sociale : réinsertion, par le travail, de personnes en situation de handicap psychique, de réfugiés, de repris de justice ou encore de personnes ayant vécu dans la rue.
• Une mission sociétale : réduction de la fracture numérique en permettant au plus grand nombre de s’équiper en matériel informatique reconditionné, et vendu au tiers du prix du marché.
• Une mission écologique : réemploi et recyclage des déchets d’équipements électriques et électroniques (D3E) diminuant l’empreinte environnementale de la consommation.

Les conseils de phitrust pour réussir sa levée de fonds

Les critères de sélection des projets financés par Phitrust  :

• L’entreprise doit être une entreprise sociale, ayant mis au coeur de son activité une problématique sociale à laquelle elle souhaite apporter une réponse. Ce critère, certes large, permet de réaliser un premier filtre basé sur l’intention du dirigeant de la structure ;
• La forme juridique de l’entreprise doit être une SAS, Phitrust cherche en effet des structures qui ont fait le choix de permettre aux actionnaires d’avoir voix au chapitre ;
• L’entreprise doit avoir au moins deux années de chiffre d’affaire générées, Phitrust n’investit pas lors de la phase d’amorçage mais se concentre plutôt sur la période du développement, permettant ainsi à des entreprises ayant déjà validé leur business model de passer à l’étape suivante.

Phitrust investit entre 200 000 et 1 million d’euros par projet et se veut être un partenaire sur le long terme : ainsi, leur partenariat avec Ecodair remonte à 2008. Aujourd’hui, ils collaborent avec 27  entreprises dans toute la France telles que La Varappe, Main Forte, Alenvi, ou encore Responsage.

Leur processus d’investissement se déroule en plusieurs temps : pour chaque projet, ils examinent la compatibilité, la philosophie, l’état d’esprit de l’entrepreneur, puis, un comité de présélection composé des actionnaires de Phitrust évalue la dimension sociale du projet ainsi que la pertinence du business model. En cas de refus, le porteur de projet est orienté vers des structures plus adaptées. Dans le cas contraire, commence alors la phase de due diligence – c’est-à-dire l’ensemble des vérifications opérées par un investisseur en vue d’une transaction – avant un deuxième passage en comité d’investissement devant lequel l’entrepreneur vient exposer son projet devant les partenaires. Le comité décide ensuite si oui ou non, ils investissent.

Pour Davina, il est nécessaire de bien connaître l’environnement du financement à impact ; savoir qui sont les acteurs, qui fait quoi, afin de pouvoir s’adresser à la structure la plus pertinente pour son projet. Pour ce faire, deux cartographies des acteurs du financement à impact ont été présentées : la première, réalisée par l’Avise et la seconde, réalisée par FEST.

Il est également essentiel de s’entourer d’un petit board composé de gens de son réseau, permettant de faire régulièrement le point sur les objectifs que l’on souhaite atteindre. S’entourer est une force et une nécessité !

Il est par ailleurs primordial d’arriver avec un projet concret et chiffré et d’anticiper les questions et la façon dont on veut structurer l’impact et le suivi de la progression de cet impact.

Enfin, il faut prévoir du temps. Le processus de décision est souvent long, puisque Phitrust a besoin d’analyser au mieux les projets, de réunir les gens qui seront décisionnaires et, surtout, ils veulent prendre le temps d’apprendre à se connaître.

Retour sur la collaboration entre Ecodair et Phitrust

Etienne Hirschauer insiste sur le fait que la relation entre Ecodair et Phitrust est pour lui indispensable, la société d’investissement ayant en effet permis à Ecodair de s’intégrer dans l’environnement des projets à impact et de réaliser avec succès ses missions.

Cette relation de long terme, basée sur la confiance et la communication réciproque, a rendu possible l’intégration d’Ecodair à un écosystème et a permis de nombreuses collaborations, comme avec Simplon par exemple, – aussi accompagné par Phitrust – pour la mise en oeuvre de formations.

Echanges avec la salle

Question : Est-ce que Phitrust prend des dividendes ?

Réponse : Non, d’une manière générale Phitrust ne prend pas de dividendes mais ils accordent cependant des prêts pour lesquels il y a donc des intérêts. La société se rémunère quand elle sort de la participation, en réalisant une petite plus-value.

Dans de rares cas des dividendes peuvent être pris (deux sociétés du portefeuille), mais cela est discuté et prévu à l’avance avec les dirigeants. Si certaines sociétés du portefeuille avaient néanmoins la possibilité de verser des dividendes, ils seraient bien sûr reçus, mais le versement de dividendes n’est pas une condition requise car les entreprises ont d’autres priorités à adresser.

Phitrust investit  toujours en minoritaire ; il est important pour eux que les dirigeants des structures accompagnées restent majoritaires.

Q : Le label ESUS est-il un frein à la réussite de sa levée de fonds ?

R : Le Label ESUS n’est pas rédhibitoire auprès des fonds d’investissement, au contraire ! En revanche s’il peut être valorisé, la labellisation ESUS n’est pas suffisante.

Q : Une mission écologique seule pourrait-elle être considérée par Phitrust, sans projet sociétal ?

R : Phitrust regarde la partie environnementale, mais la mission sociétale du projet va être prioritaire, ce qui est une de leurs particularités. Ils ont fait le choix de cibler des projets avec une mission sociétale.

L’insertion est également privilégiée. Par exemple, la société Lemon tri, qui n’avait au départ qu’un projet environnemental et a vu son dossier refusé par Phitrust, a par la suite développé toute une activité d’insertion, en partenariat avec Danone, ce qui lui a permis de valider son dossier.

Q : Qui sont les investisseurs de Phitrust ?

R : Il y a deux types d’investisseurs :

• des investisseurs institutionnels, comme BNP Paribas ou la Fondation Caritas

• des investisseurs particuliers. Ce sont plutôt des jeunes retraités ayant fait des carrières industrielles, et ayant envie de voir des projets entrepreneuriaux qui adressent des questions sociales

Nous restons à votre disposition pour plus d’information et vous attendons nombreux à nos prochains évènements !